Poser le bon diagnostic
Pour concevoir des solutions durables aux problèmes d’enveloppe qui perdurent
Dans quelques dossiers récents, nous avons été appelés à intervenir après plusieurs tentatives infructueuses de réparation de problèmes d’infiltration d’eau, s’échelonnant parfois sur plusieurs années. Cette chronique examine le processus décisionnel qui devrait guider votre syndicat lorsque survient une problématique dans l’enveloppe de votre bâtiment.
Définissons en commençant ce que le mot « enveloppe du bâtiment » signifie. Par analogie avec le corps humain, si le squelette est la structure qui supporte le corps, alors l’enveloppe serait la peau de celui-ci. Dans le domaine de la construction, on utilise le terme générique « enveloppe du bâtiment » pour décrire toutes les composantes qui, attachées à la structure, séparent le milieu intérieur du milieu extérieur : toiture, murs extérieurs ainsi que les portes et fenêtres. Il est assez rare (quoique cela arrive) de constater dans des bâtiments que certains éléments essentiels de l’enveloppe sont manquants, comme, une section d’isolant, une pièce de pare-vapeur ou de pare-intempérie… depuis la construction initiale. Par contre, il en va tout autrement des jonctions entre les matériaux.
En effet, c’est souvent à la rencontre de deux assemblages que les fuites d’air et d’eau surviennent. Par exemple, à la jonction d’un mur extérieur et du toit, à la jonction d’un mur extérieur et d’un plancher intérieur ou autour d’une fenêtre.
L’enveloppe est une partie commune
Les problèmes les plus sournois se cachent dans les assemblages, où ils semblent attendre la fin de la période de garantie !
Les défauts apparents sont pour la plupart détectés lors de l’inspection pré-réception des parties communes. Les vices de conception ou de construction non apparents prennent parfois plusieurs années à se manifester. Par exemple, une déficience au niveau des solins intramuros ne pourra se manifester que lorsque le scellant (calfeutrage) sera en fin de vie. L’infiltration de façon constante d’une petite quantité d’eau à la fois, peut entraîner le pourrissement de l’ossature (si celle-ci est faite de bois) et la prolifération de moisissures à l’intérieur de la cavité murale.
Il ne faut pas oublier que toutes les parois murales extérieures, la toiture, les portes, les fenêtres et les toit-terrasses sont habituellement des parties communes, donc sous votre responsabilité directe en tant qu’administrateurs de syndicats de copropriété.
Poser le bon diagnostic
Nous avons souvent diagnostiqué des problématiques sérieuses liées à l’installation des portes et fenêtres. La jonction entre la composante fenêtre et le trou dans le mur est fréquemment mal réalisée pour ne pas dire mal comprise. La pose et le chevauchement des solins d’étanchéité laisse généralement à désirer (dans certains cas, nous avons vu des solins posés à l’envers!). En fait, jusqu’en 2007, il n’y avait même pas de norme canadienne régissant la pose des fenêtres, alors que la fabrication était normée par la norme A-440 de la CSA depuis 1990. Nous y reviendrons dans une prochaine chronique.
Les toits-terrasse présentent de nombreuses problématiques d’infiltration d’eau et de condensation par temps froid. Ce type de toit présente fréquemment des lacunes de conception et de construction.
Refaire le scellant ou réparer une fissure dans le parement de brique n’ont souvent pour effet que de retarder la dégradation. D’où l’importance de poser le bon diagnostic.

cheminement de l’eau dans l’assemblage
Un architecte pratique couramment la conception de détails de construction d’enveloppe. Lorsque les dessins d’architecture du bâtiment ne sont pas disponibles, il pourra reconstituer la condition existante par son expérience de concepteur en s’aidant de l’information obtenue en faisant effectuer des ouvertures exploratoires dans les murs, plancher ou plafonds.
Même lorsque les dessins d’architecture du projet initial ont été remis au Syndicat par le promoteur lors de la passation, il est fréquent que ces dessins ne représentent pas les conditions telles que construites… Il faut donc impérativement comprendre le cheminement de l’eau à travers l’assemblage des matériaux pour concevoir une solution durable (Fig.1).

est primordiale pour la durabilité de
l’intervention.
Le comportement des matériaux est une science complexe. En comparant les assemblages prévus pour votre type de bâtiment aux assemblages réellement construits, l’architecte pourra comprendre la cause probable des dommages et concevoir une solution durable à un problème qui perdure.
L’architecte pourra ensuite concevoir des travaux correctifs basés sur les faits observés et le type d’assemblage (Fig.2). Il pourra préparer des détails de réfection précis sur lesquels pourront se baser les soumissionnaires et l’exécutant des travaux.
Si la construction n’a pas fait l’objet d’une surveillance des travaux par les ingénieurs et architectes (ce qui est parfaitement légal au Québec…), le choix et la mise en œuvre des matériaux peuvent avoir été modifiés au chantier, entraînant des problématiques de mauvaise étanchéité.
Lorsque des dommages ou des désordres surviennent dans l’enveloppe de votre bâtiment, il faut éviter de multiplier les interventions de « patchage » et ne pas hésiter à demander l’intervention d’un expert en enveloppe.
Se mettre en mode solution
Lors de la recherche des causes d’un dommage à l’enveloppe, le processus de questionnement devrait comprendre les questions suivantes :
- Avons-nous les dessins d’architecture émis « pour construction »? Pouvons-nous les obtenir?
- Ces dessins comportent-ils des détails de construction?
- Ces dessins reflètent-ils assez fidèlement la construction telle que réalisée?
- L’architecte concepteur a-t-il surveillé les travaux de construction?
- Quels sont les éléments à risque, compte tenu du type de construction et d’assemblage présents dans le bâtiment?
- Le diagnostic a-t-il clairement établi la cause probable de l’infiltration ou de la problématique?
- Une problématique locale peut-elle se retrouver ailleurs (partout) dans le bâtiment?
- Que peut-on faire pour empêcher que les mêmes causes produisent les mêmes dommages ailleurs ?
- Les travaux correctifs sont-ils clairement expliqués au moyen de détails de construction et d’un devis avant de demander des soumissions?
- Finalement, les travaux correctifs seront-ils surveillés par l’expert qui a identifié la cause des dommages et conçu les travaux correctifs? (Ce dernier point étant essentiel pour éviter une récidive du problème).
Ainsi pouvons-nous espérer la fin des situations où des syndicats ont dépensé des sommes importantes sans résultat sur des travaux correctifs répétés avant que les causes aient été clairement identifiées.
Vous pouvez faire mieux !
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Jean-François Lavigne, Architecte associé chez ZΛRΛTÉ LΛVIGNE Architectes.
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