Les enjeux de la diversité ethnique et d’immigration dans la revitalisation urbaine.
Une stratégie d’aménagement urbain en contexte de diversité ethnique ?
La stratégie de revitalisation urbaine intégrée (RUI) propose une approche axée sur la collaboration entre les autorités et les acteurs locaux de divers domaines pour intégrer ce changement de paradigme en matière d’aménagement du territoire. Celle-ci mise particulièrement sur la pleine participation des résidents à l’amélioration de leur qualité de vie et de leur territoire.

Depuis une trentaine d’années, dans les grandes villes occidentales, la revitalisation urbaine se définit comme une démarche territorialisée de développement social, urbain et économique pour contrer la pauvreté et la dégradation de quartiers. Formalisée en politique ou en programme, elle a pour but de sortir des modes traditionnels d’intervention en vase clos sur l’espace urbain pour plutôt prendre en charge l’ensemble des problématiques associées à la dégradation d’un milieu de vie et assurer des résultats durables. Au Québec, la RUI connaît un rayonnement important depuis le début des années 2000. En fait, la stratégie a été créée dans la foulée de la sanction de la loi 170 qui visait à réformer l’organisation territoriale des régions métropolitaines de Montréal, de Québec et de l’Outaouais. Dans le contexte montréalais, la RUI découle des démarches entreprises à la suite des changements administratifs et du renforcement de sa structure et du Sommet de Montréal tenu en 2002.
La RUI est une démarche de concertation multisectorielle et implique une variété d’acteurs pour la planifier et l’opérer. À la Ville de Montréal, elle est sous la responsabilité de la Direction de la diversité sociale. La démarche occupe une place importante au chapitre des grandes orientations du plan d’urbanisme de Montréal : « elle entend agir sur plusieurs éléments du cadre physique et bâti, comme le logement, les équipements et l’aménagement urbain, mais aussi sur les facteurs sociaux et économiques. Une approche intégrée et multisectorielle aura ainsi des effets durables sur les conditions physiques et socio-économiques dans les secteurs visés [1] ». La mobilisation des citoyens et des intervenants professionnels, l’établissement des mesures de lutte contre la pauvreté et l’amélioration du cadre bâti sont constitutifs de la démarche.

La RUI se caractérise également par un plan d’action qui s’échelonne sur une période de dix ans. Sur une base pluriannuelle, le financement provient essentiellement d’ententes gouvernementales et institutionnelles entre le gouvernement provincial et les municipalités. À Montréal, douze RUI de taille variable sont recensées jusqu’à présent (figure1). Le découpage des RUI est décidé en fonction de l’indice élevé de défavorisation matérielle et sociale, établi par Pampalon et Raymond [2]. Ce dernier inclut entre autres des indicateurs tels que le taux de chômage, le taux de scolarité, ou de monoparentalité. Cependant, les montants injectés sont faibles. Pour couvrir la douzaine répartie sur l’île, 1,5 million de dollars ont été octroyés en 2017.
Parmi les 12 RUI situées sur le territoire montréalais, 8 sont situées dans des zones affichant un taux d’immigration variant de 25 % à plus de 80 %.
Sous la loupe : la RUI en contexte de diversité ethnique
Une étude de cas menée dans le cadre de ma maîtrise en études urbaines avait pour objectif d’illustrer les façons qu’ont les acteurs locaux de différents secteurs de traiter et de tenir compte des enjeux de diversité ethnique et d’immigration dans une démarche RUI, et dans quels termes ils en parlaient [3].
Pour ce faire, des observations de terrain ont été menées et des entrevues avec sept intervenants de la RUI dans les secteurs de l’aménagement urbain et du développement social ont été conduites. Le cas retenu a été celui de la RUI Airlie-Bayne à Montréal (arrondissement LaSalle), puisque cette RUI se caractérise par une forte hausse d’immigration récente et hétérogène. Dès lors, les actions que les intervenants ont priorisées concernent autant l’amélioration du cadre bâti que l’immigration.
[1] VILLE DE MONTRÉAL. « Les orientations d’aménagement » (partie 1, chapitre 2), dans Plan d’urbanisme de Montréal, 2016.
[2] PAMPALON, Robert et Guy RAYMOND. « Indice de défavorisation matérielle et sociale. Son application au secteur de la santé et du bien-être », Santé, société et solidarité, 2 (1), 2003, p. 191-208
[3] KELLY DORAIS, Carolyn. « Planification urbaine et politique de revitalisation urbaine intégrée en contexte de diversité ethnoculturelle. Le cas d’Airlie-Bayne à Montréal », Centre Urbanisation Culture Société, Institut national de recherche scientifique, 2017.